Lorsque tu lis le mot “vendeur”, quelle image te vient à l’esprit? Prends quelques secondes pour faire l’exercice.
Personnellement, ce mot m’évoque un gros monsieur bedonnant qui porte une chemise rayée mal rentrée dans ses jeans (on lui voit le nombril) ainsi qu’une chaîne en or et de grosses lunettes fumées.
Personne n’aime les vendeurs pour la simple et bonne raison que personne n’aime l’expérience de se faire vendre quelque chose.
C’est pourquoi les meilleurs vendeurs ne sont pas les beaux parleurs, mais bien ceux qui sont effacés, écoutent attentivement et posent de bonnes questions.
Personne n’aime se faire vendre, mais tout le monde aime se faire écouter.
Quelqu’un qui ressemble trop à l'archétype d’un vendeur déclenche une alerte rouge dans la tête des gens. Ça les met sur leurs gardes et il faut ensuite faire du judo verbal pour accomplir quoi que ce soit.
Bien sûr, les gens vont parfois se laisser impressionner et dire “oui”, mais, dès que la tension baisse, le “oui” redevient vite un “non”.
Le point que je veux amener est le suivant: la vente ne ressemble en rien à l’image que tu t’es faite il y a quelques instants.
On est tous des entrepreneurs malgré nous. Si tu es un employé, tu es dans la business de vendre ton temps. Que tu le veuilles ou pas, tu dois donc aussi porter le chapeau de vendeur, alors avale la pilule tout de suite qu’on passe à autre chose.
La plupart des gens portent ce chapeau à reculons. Ils détestent ça et n’ont jamais pris le temps d’apprendre les fondamentaux, ce qui sabote leur succès.
Mon objectif, dans cet article, est de te partager le petit 20 % qui va te donner 80 % des bénéfices, une fondation solide pour te permettre de devenir quelqu’un de plus persuasif.
As-tu déjà entendu la phrase: “Un bon vendeur peut vendre un frigidaire à un Esquimau”? À moins que tu ne vives sous une roche depuis ta naissance, c’est certain que oui. L’image du vendeur manipulateur, de l’arnaqueur et du fraudeur est imbriquée dans les mythes de notre société.
Mais tout ça, c’est dans notre tête. Dans la réalité, un bon vendeur est plutôt celui qui leur vend raquettes et couvertures chauffantes.
Son rôle n’est pas de convaincre une personne d’agir à l’encontre de ses intérêts pour son gain personnel, mais bien de découvrir les problèmes, aspirations et frustrations des gens pour ensuite leur proposer une solution.
Dans ce que je viens de dire, la première étape n’est pas de parler, mais bien d’écouter. Souvent, les gens ne savent même pas qu’ils ont un problème, encore moins qu’ils ont besoin d’une solution!
C’est normal d’être enthousiaste à propos de son produit ou projet. C’est normal de vouloir impressionner les gens avec ses caractéristiques et fonctionnalités qui éclipsent la compétition. Beaucoup font cette erreur, moi le premier.
Mais les gens n’en ont rien à faire qu’un téléphone ait un processeur SnapDragon à huit coeurs cadencés à 2 GHz avec 4 giga-octets de mémoire vive ainsi qu’une caméra frontale de 12 mégapixels! Il n’y a que les geeks comme moi que ça intéresse.
Lorsque Apple a commercialisé le iPod pour la première fois en 2001, le seul message de leur publicité était: “iPod, 1 000 chansons dans ta poche”. On connaît la suite de l’histoire.
C’est possible de vendre et de rendre service en même temps. Les deux ne sont pas incompatibles, en fait, ils vont main dans la main. Vendre est humain.
Si les trois dernières phrases t’ont fait hausser un sourcil, alors tu vas aimer ce qui suit. Je vais te proposer une réflexion sur ce que signifie “vendre” pour ensuite parler de l’attitude et du mindset nécessaire pour être naturellement persuasif.
Ensuite, je vais te parler de la méthode SPIN: une façon d’approcher les ventes développée par Huthwaite, une des plus prestigieuses agences de coaching et d’entraînement en vente, négociation et communication. Cette méthode est issue de l’analyse de l’impact de 116 facteurs sur 35 000 transactions récoltées et décortiquées sur plus de 10 ans. Elle a redéfini ma façon d’aborder n’importe quel problème de communication, que ce soit dans un cadre professionnel ou personnel, à petite ou à grande échelle.
Que tu présentes un projet à ton patron, une destination vacances à ton/ta partenaire ou un choix de film à tes amis, ta mission reste la même: obtenir un “oui”.
Peu importe les obstacles que tu dois surmonter, il ne faut pas perdre cet objectif de vue.
Trop souvent, nos émotions s’invitent sans scrupule et gâchent la fête pour tout le monde. Leur seul objectif: attirer notre attention et nous faire perdre la balle des yeux. Tout d’un coup, une opportunité se transforme en conflit. Dans le coin droit, ton identité. L’enjeu? Une vraie farce: le vainqueur ne gagne rien, l’autre perd la face.
Pour éviter le désastre, tu dois établir ton but ultime: quel “oui” souhaites-tu obtenir?
Dès que la discussion démarre, notre égo, la résistance — appelle ça comme tu veux — va tout faire pour nous distraire, nuancer les enjeux et nous faire dévier de notre but.
Lorsque tu vends, la seule chose réellement importante est l’objectif. Tout le reste est secondaire.
Est-ce que je te propose de t’engager dans une guerre de coercition où tout est permis: pression, mensonges et insultes? Non, tout le contraire.
La communication est à propos de l’autre.
L’objectif est d’amener la personne du point “A” au point “Z” et “Z” est l’endroit où tu te trouves. Oui, tu peux attendre à la ligne d’arrivée. Mais si c’est ta stratégie, je te recommande de t’abonner à Netflix, ça risque d’être long. Va rejoindre la personne où elle se trouve, soit son guide invisible tout au long du processus.
Une question pertinente à se poser serait: “Pour être capable d’accepter ma proposition, à quelle autre question doit-on d’abord répondre ‘oui’?” Quelles sont les objections qui attendent la personne sur son chemin?
Morcelle ton idée, commence par la base et progresse vers ton objectif un petit “oui” à la fois.
C’est possible que l’autre résiste à tes suggestions. Il faut écouter Bruce Lee et être “comme l’eau qui se fraie un chemin à travers les fissures. Ne pas chercher à s’imposer, mais s’ajuster à l’objet.”
L’autre peut être ingrat, refuser ton idée pour ensuite se l’approprier. Résiste à la tentation de lui rappeler que c’est toi qui lui a donnée. Garde l’objectif en tête, ignore ton égo.
On a besoin de croire qu’on est autodéterminé, que nos pensées sont originales et qu’on est en contrôle de notre destinée. Faire quelque chose parce qu’on a choisi de le faire est extrêmement motivant. (Tu te souviens du film Inception?)
Rappeler à l’autre qu’on est l’architecte de sa prise de décision est incroyablement contre-productif: ça compromet sérieusement l’engagement et la motivation de la personne envers l’idée qu’elle croit être la sienne.
Quel est ton objectif? Avoir raison? Garde les yeux sur la balle, soit comme de l’eau.
Les dernières lignes t’ont peut-être fait grincer des dents. Ça ne semble pas un peu… Malhonnête? Manipulateur? Vendre n’était pas censé être une expérience humaine? Éthique?
Ça l’est, rassure-toi. Mais lorsqu’on vend, l’objectif n’est pas de déterminer qui a raison, mais d’avoir des résultats. Tu veux convaincre l’autre personne. SON égo est important, le tien ne l’est pas.
Les échanges peuvent parfois devenir hostiles. Chaque insulte ne sert qu’à te déstabiliser, n’est qu’un appât pour forcer ton égo poilu hors de sa taière. Un professionnel garde la tête froide, comme Morgan Freeman à la fin du film Ted 2.
Dans cette scène, Mark Wahlberg dit à Morgan Freeman (un prestigieux avocat qui a refusé de prendre le cas de Ted plus tôt dans le film) d’aller se faire foutre, sur quoi il répond “Je le ferai et, aussitôt que j’aurai fini de me faire foutre, j’aimerais prendre votre cas”.
Vendre est un exercice d’empathie. Peu importe les enjeux, c’est notre rôle de regarder le monde à travers les yeux de l’autre. Il ne retournera pas la courtoisie, mais ce n’est pas important. Ne prend rien personnel, ce n’est pas à propos de toi.
Pour arriver à ses fins, obtenir un “Oui!” honnête et sincère, il faut souvent s’effacer pour donner toute l’importance à l’autre personne. C’est pour cette raison que je dis que la vente est humaine et éthique, on approche le processus d’un oeil altruiste, optimiste et bienveillant.
C’est facile à faire lorsqu’on vend à un consommateur qu’on ne connaît pas, mais lorsque la personne à l’autre bout de la table est un patron, un collègue, un ami ou son conjoint, les choses deviennent vite personnelles.
Mais les règles ne changent pas. Sois comme de l’eau.
Lorsque tu vas t’acheter un café, tu ne veux pas nécessairement que la barista essaie d’être empathique avec toi. Tu veux juste un bon cappuccino le moins cher et le plus rapidement possible pour que tu puisses continuer ta journée. Mais plus l’engagement et le prix sont élevés, plus le cycle de vente est long et plus le mindset que je viens de te partager ainsi que la méthode SPIN deviennent utiles.
Assez de préliminaires! C’est quoi cette fameuse méthode?
C’est très simple, tu vas voir. Elle divise le cycle de vente en 4 étapes et chacune d’entre elles te demande de poser certaines questions. Il ne s’agit pas de poser des questions ouvertes ou fermées, ça on s’en fout. Ce n’est pas le type de question qui est important, mais l’objectif derrière ces questions.
Tu l’auras deviné, SPIN est un acronyme pour décrire chacune de ces étapes: Situation, Problème, Implications et Need-Payoff (il s’agit d’une méthode anglophone, la dernière lettre se traduit très mal).
La première étape est de collecter les informations qu’on a besoin pour être capable de faire une proposition pertinente au contexte de la personne.
Si tu veux implémenter un projet dans ton entreprise, tu vas t’informer et poser des questions sur les personnes en charge, la logistique, les méthodes, logiciels utilisés, etc.
Lors d’un appel ou d’une rencontre de vente, il faut en poser le moins possible. Tu es la seule personne qui gagne quoi que ce soit en posant ce genre de questions, l’autre perd son temps.
Si possible, fais tes recherches à l’avance.
Ça va toujours mieux vendre une solution lorsque l’autre personne admet avoir un problème.
La deuxième étape du processus de vente est de creuser pour trouver et faire l’inventaire des frustrations des gens.
Par exemple:
Jusqu’à présent, il n’y a rien de révolutionnaire. Les questions à propos de la situation et du problème sont complètement naturelles et à la base de n’importe quel processus de vente. C’est l’introduction des deux autres étapes qui rend cette méthode magique!
Une fois le problème découvert, la plupart des gens vont sauter sur l’occasion pour offrir leur solution. Ça fonctionne lorsque la solution est abordable et que l’engagement derrière la vente est bas mais, lorsque ce n’est pas le cas, “pitcher” une solution à cette étape risque très certainement de tuer la vente.
Dans ta tête de vendeur, tu vois immédiatement le lien entre le problème et la solution. Mais pour le client, ce n’est pas encore clair pourquoi il aurait besoin de ton produit/service.
Il faut faire prendre conscience au prospect des implications du problème!
Ton système de gestion est lent? Qu’est-ce que ça implique comme conséquences négatives? Combien d’heures est-ce que tes employés perdent chaque semaine pour faire des tâches simples? Est-ce que l’usage de ce système crée un problème de roulement d’employés? Combien ça coûte former un employé pour utiliser ce système? Est-ce que le problème affecte la qualité du produit? Crois-tu perdre des ventes à cause de ça?
L’idée est de faire prendre conscience à la personne de l’ampleur réelle du problème que tu souhaites régler. Plus les implications sont grandes, plus le désir et l’urgence de trouver une solution augmentent.
Une fois qu’on a trouvé un problème et qu’on a fait l’inventaire de ses répercussions négatives, il faut maintenant changer le cap de la conversation vers le positif. On transforme le momentum établi lors des questions d’implications pour se demander quels sont les avantages à régler ce problème.
Exemple:
Ce type de question permet d’accomplir deux choses:
Tu serais intéressé d’avoir une solution pour simplifier la prise de rendez-vous lors de consultations? Pourquoi est-ce que c’est important pour toi? Est-ce que tu aimerais un système qui s’occupe de faire les suivis automatiquement? Quels autres problèmes est-ce que ça règlerait? Crois-tu que ça va réduire les annulations de dernière minute? Quel impact crois-tu que ce système aurait chez ta clientèle?
Lorsqu’un prospect fait l’inventaire des bénéfices lui-même, alors ses objections (comme le prix ou un défaut dans le service ou produit offert) semblent plus acceptables.
Ce genre de questions possède également un deuxième effet important: il entraîne le prospect à vendre la solution.
Lorsqu’on vend quelque chose dans une entreprise, c’est très rare qu’on va s’adresser directement au preneur de décision. Habituellement, on passe par un intermédiaire qui doit faire approuver la dépense par quelqu’un au-dessus de lui. Même le PDG doit répondre à un conseil d’administration.
Ça veut dire que ton prospect devra se tourner de bord et parler de ta solution à ses supérieurs. Si tu lui fais dire lui-même les bénéfices et avantages et qu’il “achète” mentalement ta solution, tu le transformes en petit vendeur qui va travailler pour toi au sein de l’autre organisation.
Finalement, la méthode SPIN propose une façon très particulière de parler de son produit. Traditionnellement, on va faire la distinction entre les caractéristiques (3go de mémoire) et les bénéfices (1 000 chansons dans ta poche).
Ceci étant dit, la méthode SPIN va une étape plus loin...
Lors des questions sur les problèmes, l’objectif est de faire l’inventaire des besoins implicites. C’est-à-dire que si je dis que mon site web est lent, alors ça implique que je pourrais bénéficier d’un serveur plus rapide (avec plus de mémoire vive ou un meilleur processeur).
Lors des questions Need-Payoff, l’objectif est de faire en sorte que le prospect explicite ses besoins en disant “ça aiderait vraiment nos ventes d’avoir un site web plus rapide”.
Donc lorsqu’on propose la solution et qu’on parle du produit, on peut rattacher les bénéfices à ce que la personne a dit plus tôt dans l’appel!
Par exemple:
Lorsque tu vas chez le psychologue, tes problèmes sont presque immédiatement apparents pour lui. Cependant, il ne peut pas simplement te dire après deux sessions que tu as un problème d’attachement causé par une enfance traumatique et que la seule façon de sauver ton mariage est de faire la paix avec Tony qui t’a brutalisé en secondaire deux. Pour faire des progrès, il doit t’amener à voir tes problèmes par toi-même et, s’il est trop évident dans ses questions, tu suspectes qu’il essaie de te manipuler et ça te met sur tes gardes.
La méthode SPIN observe un peu le même principe. Bien que notre intention soit évidente (vendre), il faut le faire en amenant l’autre personne sur une réflexion qui va la convaincre elle-même de la nécessité de ton produit!
Les gens n’achètent pas d’un vendeur parce qu’il connaît bien ses produits, mais parce qu'ils sentent qu’il comprend leurs problèmes.
C’est exactement ce que la méthode SPIN accomplit en posant les bonnes questions situationnelles et en prenant le temps de bien définir le problème.
Non seulement ça, mais les gens achètent lorsque la frustration causée par le problème est plus grande que le coût associé à sa solution.
C’est là que les questions d’implications entrent en jeux. On amène la personne à réaliser l’ampleur du problème pour augmenter sa motivation à passer à l’action.
Ensuite, on guide le prospect pour qu’il verbalise lui-même les avantages d’une solution à son problème pour réduire les objections.
Finalement, on présente le produit de façon à ce que chaque point de vente réponde directement à un besoin que le client a clairement exprimé lors de la rencontre.
Bien sûr, ceci n’était qu’un très très court résumé de la méthode. Le livre complet est disponible sur amazon et vaut chaque dollar investi. L’auteur propose des exemples concrets ainsi que des exercices pratiques à mettre en application.
L’objectif de cet article était de montrer une facette différente de la vente, de briser le stéréotype du gars avec une fausse montre en or et qui essaie de te recruter dans une compagnie pyramidale. La vente est à propos de l’autre. Ça implique qu’il faut arrêter de vanter son produit (ou soi-même), de poser les bonnes questions et d’écouter. Ce n’est qu’une fois que la personne s’est convaincue elle-même de l’importance d’un problème et des bénéfices de sa solution qu’on doit faire comme Martin Matte et dire: “Alors je fais ça à quel nom?”